Sous-valoriser un bien à l'Impôt sur la fortune immobilière (IFI), une fausse bonne idée ?

Qu’est-ce que l’impôt sur la fortune immobilière ?

Les contribuables détenant un patrimoine immobilier dont la valeur dépasse 1 300 000 €, au 1er janvier d’une année, sont soumis à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI). La valeur à retenir pour la déclaration est la valeur vénale, c’est-à-dire la valeur qu’aurait le bien s’il était vendu[1]. Plusieurs modalités d’évaluation sont possibles : des expertises immobilières, la comparaison avec des biens équivalents vendus récemment ou même à partir des rendements locatifs. Il est recommandé de conserver la trace de son estimation pour justifier les valeurs retenues en cas de contrôle.

Certains actifs immobiliers peuvent bénéficier d’un ajustement à la baisse de leur valorisation

Il peut s’agir d’abattement légaux et définis. C’est le cas de la résidence principale qui bénéficie d’un abattement de 30%. Attention, pour bénéficier de cet abattement le bien doit être détenu en direct et non à travers une SCI. 

Il peut aussi s’agir d’abattements “tolérés” en accord avec la pratique de l’administration fiscale. Dans ce cas, ces abattements sont liés à des situations particulières : prise en compte de situations d’indivision, de vétusté, ou d’illiquidité[1].

Certains biens font même l’objet d’exonérations totales ou partielles, sous conditions, comme les forêts, les biens professionnels ou les biens ruraux qui sont donnés en location avec un bail à long terme.

Quels sont les risques de la sous-valorisation d’un bien à l’impôt sur la fortune immobilière ?

Pour certains contribuables, il est tentant de sous-valoriser certains biens, de façon à économiser un petit peu d’IFI. C’est une pratique qui comporte des risques de plusieurs sort :

  • D’abord et de façon assez évidente on risque un “redressement fiscal”, c’est-à-dire un complément d’IFI à acquitter, assorti en général de majorations et d’intérêts de retard. Le délai de reprise pendant lequel l’administration peut s’émouvoir des valeurs retenues est en théorie de 3 ans[1] en plus de l’année en cours, mais en réalité c’est souvent 6 ans en plus de l’année en cours. En effet, si l’administration ne dispose pas des tous les éléments qui lui permettent de réaliser un contrôle approfondi, elle est en droit d’augmenter son délai de reprise. La déclaration simplifiée de l’IFI en même temps que les revenus N-1 est donc à double tranchant et permet des redressements sur une durée plus longue !
  • Par ailleurs, il est important de savoir que l’administration fiscale s’est modernisée de façon spectaculaire au cours des dernières années. À présent, elle peut réaliser des croisements et des recoupements à grande échelle pour “traquer” les fraudeurs.
  • Les risques de contrôles fiscaux ne se limitent pas à l’IFI lui-même. En effet, une sous-valorisation peut également donner lieu à des rectifications en matière de droits de succession ou de donation lorsque la valeur retenue est celle utilisée par le contribuable dans son impôt sur la fortune, ou même lorsqu’il existe un écart entre les valeurs retenues lors de ces opérations en apparence distinctes.
  • Au-delà du mécontentement de l’administration fiscale, sous valoriser un bien à l’IFI peut également avoir des conséquences avec sa banque. Les établissements bancaires sont désormais tenus de déclarer à TRACFIN les soupçons qu’ils peuvent avoir en matière de fraude fiscale. Lorsque l’on ouvre un compte auprès d’un établissement bancaire, la banque vous demande de communiquer l’ensemble de vos documents fiscaux et notamment votre déclaration d’IFI. Si les valeurs retenues sont trop caricaturales la banque n’a pas d’autres choix que de réaliser une déclaration de soupçon. Si, de surcroît, une opération de financement ou de refinancement du bien était envisagée, il est bien évident que la banque ne pourra pas prêter un montant très différent de celui qui avait été pris pour les déclarations fiscales.

Ainsi, les sources d’informations et de potentiel contrôle sont nombreuses pour l’administration fiscale. Il y a donc un risque permanent de ne pas pouvoir gérer son patrimoine immobilier de façon libre.

Quels sont les conséquences de cette sous-valorisation sur la transmission de patrimoine ?

Cette sous valorisation peut également avoir des conséquences importantes dans la vie de la famille. Lorsque le patrimoine est transmis à des héritiers ou des donataires avec des valeurs qui ne reflètent pas la réalité, certains bénéficiaires vont être lésés par rapport à d’autres lorsqu’ils se verront attribuer des lots réputés avoir la même valeur alors que dans les faits il n’en est rien ! Cela donne régulièrement lieu à des conflits dans la famille.

Il n’y a pas de fatalité. Le contribuable peut demander à réaliser une régularisation spontanée de ses déclarations passées. De plus, il existe des façons de limiter son IFI, de façon sécurisée. On peut par exemple réaliser des dons à des associations[1], amorcer ou poursuivre la transmission de son patrimoine, arbitrer des actifs taxables ou même, dans certains cas, bénéficier d’un plafonnement. En fait, il faut voir la situation patrimoniale globale : si l’IFI est un irritant, c’est parfois le signe qu’il est utile d’analyser sa situation fiscale globale (Impôt sur le revenu, IFI et droits de donation/succession), de déterminer les objectifs de la famille et de revoir l’organisation de son patrimoine dans son ensemble.