La détention de l’immobilier d’exploitation
L’acquisition des locaux de son entreprise est en général une équation complexe pour le dirigeant : c’est une opération complexe avec de multiples options.
Le mode de détention : au bilan ou en dehors de l’entreprise ?
La première interrogation consiste à déterminer si le bien sera inscrit au bilan de l’entreprise, ou dans une structure distincte. Les deux solutions présentent des arguments intéressants. Quand l’entreprise est propriétaire de son immobilier, cela lui donne un actif précieux qui rassurera parfois un banquier ou permettra une opération de lease-back (cf. ENCADRE). Cela permettra également, le moment venu, de transmettre l’immobilier de l’entreprise avec les mêmes avantages que les titres de l’entreprise elle-même avec le Pacte Dutreil.
En cas de détention dans une société distincte, en général une Société Civile Immobilière (SCI), cela permet d’enrichir la famille grâce à l’entreprise, mais avec un actif séparé. En général l’acquisition initiale se fait à l’aide d’un crédit et une fois la banque remboursée, les loyers permettent au dirigeant de se constituer des revenus complémentaires. Ce mode de détention sollicite toutefois de la trésorerie, surtout lorsque la SCI est translucide. Dans ce cas les revenus fonciers sont soumis à l’impôt sur le revenu, aux prélèvements sociaux et parfois également à la CEHR soit un taux marginal qui peut atteindre 64,5% et entraîne souvent un effort de trésorerie personnel de la part des associés. Il faudra également réfléchir et envisager la transmission du bien très en amont car les droits de succession peuvent atteindre 45% en ligne directe en cas de succession non préparée… et il n’est pas toujours possible ou facile d’associer les enfants dès l’origine pour leur permettre de profiter de l’effet de levier de l’investissement.
Jusqu’à la série de lois de finances rectificatives qui a suivi l’élection présidentielle de 2012, le recours fréquent au démembrement permettait de combiner les avantages des 2 modalités. En synthèse : L’entreprise achetait un usufruit à durée fixe avec un crédit, en général de 12 à 18 ans, tandis que la famille achetait la nue-propriété via une SCI translucide avec des liquidités personnelles. Une fois l’usufruit éteint, la SCI devenait pleine propriétaire du bien sans droit complémentaire… et dans les cas les plus caricaturaux, elle s’empressait de revendre un usufruit à la société. La taxation du vendeur de l’usufruit au titre des revenus fonciers (et non de la plus-value) a mis un coup d’arrêt brutal au développement exponentiel de ces opérations qui ne peuvent désormais s’envisager que dans certains cas limités, et avec des précautions particulières.
Il n’y a pas de solution parfaite qui permette de faire un choix évident qui fonctionnerait dans toutes les situations. Mais la planification immobilière de l’entreprise ne doit pas être négligée pour autant, elle fait incontestablement partie de la stratégie patrimoniale de l’entrepreneur et sera utile par exemple pour envisager des revenus complémentaires, financer une sortie d’actionnaire, équilibrer les lots à transmettre…
Le retour en vogue des opérations de lease-back !
Parmi les quelques nouveautés présentes dans la loi de finances 2021, il faut se réjouir de la mesure favorisant les opérations de cession-bail. Cela consiste pour une entreprise à vendre son immobilier d’exploitation à un crédit-bailleur qui le remet à sa disposition moyennant des échéances pour une durée convenue (en général 7 à 15 ans). C’est une façon simple d’obtenir un crédit à taux fixe sur une durée longue avec une garantie de qualité.
À la fin de l’opération, le locataire redevient en général propriétaire grâce à une levée d’option. Cette opération permet à l’entreprise de recueillir des liquidités pour ses projets, mais en déclenchant dès l’origine la taxation de la plus-value réalisée entre le prix de vente et la valeur nette comptable…L’entreprise disposera d’une charge annuelle déductible pendant la durée du lease-back, synonyme d’économie d’IS.
La loi de finances 2021 permet d’étaler la plus-value taxable sur la durée du lease-back. Cela signifie donc que l’entreprise qui réalise cette opération touche le prix de vente, mais ne va payer l’impôt que par fraction, alors même qu’elle réduira l’effet de ce produit avec la charge de loyer.