Le conjoint survivant est protégé par la loi qui lui garantit des droits et des options dans la succession du conjoint décédé. Ces dispositifs méconnus ne sont en général détaillés que dans les semaines qui suivent le deuil, et les décisions sont prises parfois rapidement pour procéder aux partages et aux calculs liés à la succession. Quelques explications sur ce que prévoit la loi pour protéger les veufs et les veuves.
Quelle différence entre le droit temporaire et le droit viager au logement du conjoint survivant ?
Lorsqu’une personne mariée décède, son conjoint survivant dispose de certains privilèges et ce, quel que soit leur régime matrimonial. Il dispose notamment du droit d’utiliser et d’habiter la résidence principale du couple pendant un an, et personne ne peut l’en priver, même pas le conjoint par anticipation. Ce droit temporaire au logement permet au conjoint survivant de bénéficier du logement gratuitement et du mobilier qui le garnit, même si le défunt en était le seul propriétaire.
Concrètement, cela signifie qu’il peut occuper le bien sans contrepartie, le loyer éventuel étant pris en charge par la succession. Le conjoint survivant peut également bénéficier, sauf volonté contraire du défunt exprimée dans un testament, d’un droit viager au logement, si la demande est faite dans l’année du décès. Ce privilège n’augmente pas les droits du conjoint dans la succession mais il lui permet de bénéficier en priorité par rapport aux autres héritiers de sa résidence principale afin de protéger son cadre de vie jusqu’à son décès.
De quelle part du patrimoine hérite le conjoint survivant ?
Le conjoint survivant a également des droits dans la succession. Ces droits déprendront de la qualité et du rang des autres héritiers appelés à la succession : enfants, parents, neveux, petits-neveux… En présence d’enfants, ces derniers sont des héritiers réservataires, ils ne peuvent être privés d’une partie du patrimoine du défunt. Le conjoint survivant n’est héritier réservataire qu’en l’absence de descendants, et pour 25% du patrimoine du décès.
Cela dit, avec ou sans enfant, la dévolution légale qui est la répartition du patrimoine du défunt en l’absence de testament, est plus généreuse que ce minimum.
En effet, si tous les enfants du défunt sont communs avec le conjoint survivant, ce dernier peut alors choisir entre la pleine propriété du quart de la succession ou l’usufruit de la totalité des biens, c’est-à-dire le droit d’utiliser les biens ou d’en percevoir les revenus. En présence d’enfant non commun, le conjoint n’a pas de choix et doit obligatoirement prendre un quart en pleine propriété.
Outre les droits légaux dont dispose le conjoint survivant, il peut bénéficier d’une protection supplémentaire grâce à un testament, ou à une donation entre époux également appelé donation au dernier vivant. Il s’agit d’un acte notarié par lequel un époux exprime sa volonté de transmettre à son décès tout ou partie de ses biens à son conjoint. Cet acte permet d’accroitre les droits du conjoint survivant au-delà de ce que prévoit la loi, puisqu’il pourra choisir entre l’usufruit de la succession ou, une part des biens successoraux allant de ¼ à la moitié selon le nombre d’enfants, ou encore ¼ des biens en pleine propriété et ¾ en usufruit.
Dans l’hypothèse où le conjoint survivant choisit l’usufruit sur les biens du défunt, la conversion de cet usufruit en rente viagère est possible. Cette faculté de conversion, à la demande du conjoint successible ou de l’un des héritiers nus-propriétaires permet aux enfants nus-propriétaires de récupérer la pleine propriété des biens, à charge pour eux de verser une rente au conjoint survivant pendant toute sa vie.
En présence d’une famille dite recomposée, la donation entre époux permet de transmettre au conjoint survivant des droits en usufruit, bien supérieurs à ce qu’il est possible de faire avec les droits légaux. L’usufruit permet au conjoint de conserver son train de vie, puisqu’il lui donne droit aux revenus produits par les biens successoraux. Attention toutefois à l’entente familiale dans le cadre d’une famille recomposée, car la détention d’un bien immobilier démembré nécessite l’accord de tous pour la vente du bien.
Cette donation au dernier vivant, modifiable ou révocable à tout moment, porte donc sur les biens de l’époux au jour de son décès, aucun transfert de propriété immédiat n’est ainsi réalisé en faveur du conjoint. Le plus souvent, les époux se consentiront une donation au dernier vivant réciproque et identique, mais il ne s’agit pas là d’une obligation.
Dans tous les cas, le conjoint marié (ou pacsé) recueille sa part d’héritage en exonération de droits de succession.
Quels revenus peut espérer le veuf ou la veuve ?
Enfin, le conjoint survivant peut bénéficier d’une pension de réversion qui correspond à une prestation en espèces versée après le décès de l’assuré en activité ou en retraite, à son conjoint survivant. Il s’agit d’un droit dérivé dont le montant est fonction du droit de l’assuré décédé. Les règles d’attribution et les taux des pensions de réversion sont très contrastés selon les régimes (bases/complémentaires). Et s’il ne peut pas subvenir à ses besoins, il peut bénéficier d’une pension alimentaire supportée par la succession.
Le conjoint survivant dispose de nombreuses possibilités pour protéger son cadre de vie, ses revenus, et son patrimoine, mais la rapidité avec laquelle il doit prendre des décisions, alors même qu’il traverse un deuil, n’est pas toujours propice à comprendre les enjeux et à choisir au mieux de ses intérêts